Etats d'âme d'une femme

Publié le par SAM

Confiance :

Tout recommencer. De zéro. Faire table rase du passé. Balayer d’un coup de coude déterminé toutes les futilités qui se sont amoncelées, obscurcissant mon horizon : les illusions, les déceptions, les regrets, les remords, la colère, la rancœur, le chagrin, le renoncement.

Chérir du regard cet espace qui s’offre à moi. Vierge. Reboiser ces paysages d’êtres que j’aurai préalablement choisis, amis dignes de moi.

Gambader dans les herbes hautes, contournant les embûches qui surgiront devant moi, ou m’y risquer, sachant que j’ai les armes pour en sortir à ma guise.

Escalader ces talus escarpés, poser le pied bien droit, sans fléchir, ne pas devenir une proie facile. La tête haute, le regard perçant, la silhouette apparemment nonchalante mais toujours sur le qui-vive.

Partir à l’aventure, vivre enfin ! Croiser le fer avec les obstacles, les écraser d’un coup de talon.

Accepter ce que l’on me propose, donner à ceux qui le méritent.

M’offrir à des corps étrangers, ne gardant que mon cœur. Quand l’amour sera là, m’y engloutir, à demi vaincue.

Prendre le temps de la pose, déguster patiemment. L’attente fait monter le désir, inassouvi s’il est consommé goulûment.

Ecouter les vifs d’esprit qui parlent pour instruire et non pour épater. Faire la sourde oreille devant les sots qui croient savoir alors qu’ils n’ont rien vu.

Echanger pour la beauté des mots, pour transmettre l’espoir et la joie au ventre. Ou se taire pour s’assourdir du vent, laisser le passage aux flux invisibles qui nous unissent dans le silence.

Explorer ce qui m’entoure, m’habiller de nouvelles couleurs.

Ne pas espérer ce qui ne peut advenir. Souhaiter la métamorphose de l’autre pour être suivi sur ce chemin sinon, reprendre la route sans se retourner.

Tendre la main à celui qui agonise, tourner le dos à son bourreau.

Le 4 Janvier 2007.

***

Doute :

Je suis neuve d’un Moi dépoussiéré. Dont je ne sais que faire. Les gens auprès de qui je reste sont « derrière »moi. J’ai avancé, eux non. Déséquilibre. Bientôt ils ne seront plus que des ombres, de minuscules points inaccessibles. Et cela me fait peur.

Me voilà seule, désormais, sur cette route. J’y croise des êtres inconnus, certains dont je veux me rapprocher, d’autres qui me terrorisent. Vais-je pouvoir affronter les dangers qui obstrueront inévitablement mon passage ? Aurai-je les bons réflexes ?

Je me sens forte, mais hésitante encore. L’inédit me paralyse. Je tremble, je tergiverse, j’angoisse.

Une envie me pousse en avant, cet inexorable espace qui n’attend que moi, pourtant je résiste. Je veux être sûre que le moment est venu, car il me sera impossible de faire marche arrière.

L’attente est de bon conseil quand elle développe le goût du courage et de la confiance. La faire trop durer serait s’enferrer dans un engrenage infernal.

Je vais patienter, me donner le temps de la réflexion. Je parviens à peine à moins souffrir, je serais impardonnable de foncer tête baissée dans cette boue d’immondices. Le calme va revenir, aplanir ces remous gargotants, assainir les profondeurs de cette étendue hostile.

Les larmes sont là au coin de l’œil. Un mélange de joie - victoire tant attendue, enfin acquise, non sans douleur - et d’amertume aussi - me dire que je n’ai parcouru que la moitié du chemin. Aurai-je la force de braver les enfers de ma vie ?

Pourquoi ce que je m’apprête à accomplir me semble-t-il plus terrifiant que tout ce que j’ai vaincu jusqu’à maintenant ? Alors qu’avant de réussir, je croyais n’y parvenir jamais !

A quoi me servent toutes ces interrogations inutiles, sinon à tourner en rond comme un poisson dans son bocal ! Ce n’est pas dans une eau limpide que je nage, mais dans des algues visqueuses qui s’accrochent à chacun de mes pas.

Alors dormir, oublier….

Le 5 Janvier 2007

***

Colère :

Mais pour dormir, il faut avoir le cœur en paix. Mon cœur saigne de larmes rougeoyantes, il crève de se dessécher d’amour. Epanchant ses derniers sucs. Bientôt, il se craquellera sous la fanure.

Hurler ma détresse, bouche grande ouverte, gosier béant. Jeune et pourtant si vieille ! Etait-ce mon destin de mourir avant l’heure, de dépérir dans les affres d’une demande restée dans l’oubli ?

Elle n’était pourtant pas muette, vous n’avez pu que la percevoir.

Etait-elle mal formulée, vous a-t-elle effrayé ?

Que dois-je faire, comment dois-je m’exprimer ? Dites-moi le langage grâce auquel nous pourrons communiquer. Mettez-moi sur la piste, je vous en conjure ! Vous seul détenez la solution. Mon destin repose entre vos mains !

Me voilà prise à mon propre piège, celui d’un amour destructeur qui nous aura anéantis tous les deux.

Je veux défaire les liens par lesquels vous me ligotez.

Faire un baluchon du peu d’affaires qui me tiennent à cœur, entasser mes liasses de pages griffonnées, mes pensées, ma liberté, celle que vous n’avez pas pu égorger malgré vos multiples tentatives.

Il n’y a plus d’espoir entre vous et moi, vous ne vous êtes efforcé que de reproduire ce que l’on m’a toujours infligé. J’y étais habituée, pourquoi m’auriez-vous nourrie d’autres agapes ?

C’est de nouveautés dont mon corps criait famine ! C’est dans de singulières couleurs que mes yeux voulaient se noyer ! C’est de paroles sincères que mes oreilles voulaient vibrer ! De frissons de velours dont ma peau voulait se couvrir !

J’ai été privée de toutes ces délices, délices qui vous sembleront superflues, et qui pour moi sont salutaires.

Me faut-il me battre pour les obtenir, quitte à errer longtemps ? Je le ferai. J’estime en avoir le droit. Un devoir même !

Ma féminité est là à jeter son cri comme le loup dans la nuit.

L’entendra-t-on ?

Le 5 Janvier 2007.

***

Désir :

Je ferme les paupières et me laisse emporter par la torpeur de mes souvenirs. Tes yeux…Leur forme plus que leur couleur m’a séduite.

Une bouche, des mains, détails profondément ancrés en moi et qui ne se révèlent qu’en leur présence.
Là, je peux affirmer : « C’est ce type d’homme que j’aime !!! »

Un individu charmant me paraît vite banal si ses lèvres deviennent disgracieuses lorsqu’ il parle ou sourit.

Tes yeux – bleus - mais ce n’est pas là que réside l’attrait de ma captation, j’en ai parcouru chaque ligne, dessiné en pensée leur enfoncement dans l’orbite, l’étendue de peau, sa carnation.
En faire une description plus poussée m’est impossible, cela reviendrait à rendre réel ce qui doit rester suggéré.

Lorsque nos regards se sont croisés, j’y ai vu cette interrogation : « Est-ce toi ? ».
Oui, c’était bien moi, c’était bien toi.
Puis le soulagement de s’être trouvé, reconnu.

Partage d’un moment de complicité, à jamais unique.
Oublier le monde qui nous entoure, tout ce qui n’est pas nous. Se goûter des yeux, esquisse d’une rencontre.


Lorsque nos yeux auront tout absorbé de notre image, assoiffés, ils se rapprocheront.
Je te dirai : « Patience ! »

Tu répondras : « Je n’en peux plus ! »

Et forte de mon pouvoir sur toi, je me laisserai conduire là où tes bras m’enlèvent.

J’abandonnerai mon corps à tes caresses. Nous serons embarqués tous les deux sur la même péniche, ballottés par des remous étonnants – telle une bouteille à la mer, nous
divaguerons au gré du vent.
Serai-je le contenu. Seras-tu le contenant ? Nous serons un même élément, indissociable. Morceau de verre, morceau de papier, nous ne formerons plus qu’un.

Mon corps a été crée pour y recevoir le tien. Tu t’y déposeras délicatement comme la feuille d’automne. Y puisant la sève régénératrice. Et moi, je m’abreuverai à la tige où suintent les dernières gouttes du suc qui te maintient en vie.

Enfin, mués miraculeusement, notre énergie décuplée, nous ondulerons en des arabesques d’une souplesse extravagante.

Comblés, planant dans l’eau salée de notre sueur, nous succomberons, l’un sur l’autre, à l’épuisement.

Le 9 janvier 2007.

Publié dans Epistolaires

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
C
Ce texte est une onde de choc , une tempête de vie, un hurlement à être soi, une marée d'amour à donner et à recevoir sans contraintes ni barrières ni frontières ! on ressort de cette lecture  soufflé  par ta tornade libératrice !amicalement chrystelyne
Répondre
N
Magnifique Sam! La crue des sentiments grondant comme le torrent après le déluge...Une soif de vivre et d'aimer à tout faire péter...Une liberté d'être à conquérir contre vents et marées, quoiqu'il en coûte...La peur de se tromper peut-être mais une peur plus forte encore de ne pouvoir être ce que l'on est en vérité, le refus de s'accomoder et de tricher...Une vérité si nue, si crue, si mal policée, qu'elle  vous crache à la gueule votre simulacre de vie, vos petits arrangements avec la mort...Accepter d'être rejetée, tant pis, le jeu en vaut la chandelle, ne dit-on pas que seule la vérité fâche?Assumer, pourquoi pas, de passer pour mauvaise fille, mauvaise mère ou mauvaise épouse s'il s'agit de sauver sa peau...Dans le monde des morts-vivants, l'être vivant est confondu avec le diable, la liberté sauvage devient blasphématoire, tant pis pour eux...A déposer sur lettre-lavoir si tu le veux bien...
Répondre