Aux petits coins

Publié le par SAM


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Qu’est-ce que je m’enquiquine ici ! Bon, faut voir la face douce des choses, je suis tranquille.
Mais, c’est que j’aime être utile, moi, même si ma tâche n’est pas très ragoûtante.

 

Vous vous demandez sans doute qui je suis ?

 

Physiquement, je suis rond ou carré, à vous de choisir. Dans la plupart de mes demeures je suis rond, mais dans les lieux publics, je suis carré. Allez savoir pourquoi. Sous cette forme, je dois être plus économique. Parfois, je suis même carrément (ou rondement) inexistant ; D’ailleurs, c’est mieux ainsi car là, c’est glauque !! J’aurais trop peur. Je vacillerais du rouleau.

 

Pour l’habit, suivant la gamme, cela peut aller de la douceur du satin à la froidure d’un papier glacé. Et la couleur ? Je me décline le plus souvent en rose bonbon, mais je peux être sobre et de blanc vêtu, avec quelquefois des trèfles pour ornement. Le pire, c’est ce rose pisseux pour les petites gens. Quel mauvais goût !

Oui, ma vie est plutôt reposante. Juché sur le haut d’une boîte ou empalé sur un manche, ma vue n’est pas si déplaisante, et je respire. Malheur à moi si on m’enferme dans ces cercueils de plastique où l’air peine à entrer ; C’est la mort assurée pour mes frères claustrophobes !!!! J’en ai les pointillés tout ramollis. Et vous me houspillerez de ne pas me déchirer aisément.

Voilà, je peux passer des heures de sérénité absolue, et vivre l’enfer en un claquement de doigt.

Quel stress !!!!

C’est exactement pareil lorsque ronds, on nous glisse dans des cubes. N’importe quoi ! On peut être assuré d’être gondolé de partout. Et j’tattrape, et j’te tire, et j’te déchiqute et j’recommence…On a droit à cinq minutes de roulis gratuit ! Et le mal de cylindre en prime ! Vraiment pas ergoroulique !

Ah, ça oui, vu la manière dont on nous traite, on sait à qui qu’on a à faire !

J’adore les maniaques : Ils vous pincent délicatement entre le pouce et l’index, vous étirent en prenant soin de bien suivre le mouvement de roulade et vous cisèlent précautionneusement sur les hachures préalablement effectuées ; dans leurs mains toujours propres et veloutées, ils vous plient adroitement, au millimètre près, afin d’avoir une douillette épaisseur pour absorber leurs substances organiques.

Par contre, j’exècre les enfants. Les garçons, passe encore, ils n’ont pas besoin d’essuyer la petite goutte. Mais les pisseuses, elles, vous happent agressivement, vous tiraillent, vous labourent et vous froissent expéditivement de leurs mains sales et moites.

Quelle bonheur lorsque, dans leur hâte, elles oublient notre existence. Tant pis ! C’est leur culotte qui prendra - je préfère que ce soit elle que moi - et leur partie intime sera toute rouge ! Na !

Notre rôle peut vous paraître ingrat, mais ce que vous ne savez pas - et cela restera entre vous et moi - c’est que lorsqu’on nous coupe, ou qu’on nous sépare de notre colonne cylindrale ou du reste de notre matière papièrale, nos sens olfactifs sont immédiatement mis hors service. Nous ne sentons plus rien !

Nous frictionnons, nous décrottons, nous encaustiquons ; et notre mission accomplie, nous nous purifions et nous octroyons un petit voyage bien mérité au pays des toboggans et autres  jets d’eau…

 


Publié dans Textes courts

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C
Original, courageux et plein d'humou mais pour garder un peu de suspens j'aurais  mis le dessin en fin de texte !amicalement chrystelyne
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D
Texte original que l'on relit avec plaisir : pas la moindre fausse note dans cette descrition minutieue d'un objet...pas gagné d'avance...<br /> Bravissimo ! domi
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