Au pays de la magie

Publié le par SAM

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Le Berry, région du Centre de la France s’étalant de l’Indre au Cher, est réputé pour ses paysages boisés et vallonnés, ses plans d’eau, sa gastronomie campagnarde et goûteuse, ses écrivains champêtres tels George Sand, sans oublier ses sorciers. Appelé il y a peu « le pays des sorcières », le Berry se nomme dorénavant « le pays de la magie », qualificatif moins troublant afin de ne pas effrayer les touristes. Effectivement, cette capacité à soigner les gens par des prières, si attirante soit-elle, n’en reste pas moins taboue.
 

 

 

Il existe encore aujourd’hui de ces êtres d’exception qui pratiquent leurs dons, transmis par les anciens. C’est ainsi que Monette est devenue guérisseuse à l’âge de dix-sept ans, initiée lors d’une cérémonie par sa grand-mère.

 

La jeune fille devait recopier les prières de sa main, puis les apprendre par cœur.

 

Au début, les gens étaient sceptiques et craignaient de s’en remettre aux mains d’une adolescente. Elle sut faire ses preuves et sa réputation grandit avec elle.

 

En ce qui la concerne, cette femme refuse qu’on parle de sorcellerie et qu’on la désigne de sorcière car, pour elle, ces termes symbolisent la magie noire. Elle se veut guérisseuse et insiste sur ce point

 

 

 

Monette peut guérir différents maux : brûlures, zonas, coups de soleil, allergies, entorses, cervicales douloureuses, muguet et aphtes.

 

Elle exerce dans l’ombre et s’est fait connaître grâce au bouche à oreille. Les gens n’hésitent pas à venir la consulter.

 

Elle procède toujours de la même manière : elle accueille le patient avec un petit verre en guise de bienvenue pour le mettre à l’aise. Ensuite le silence et le rituel proprement dit peuvent commencer. D’abord un signe de croix du pouce sur l’endroit douloureux, puis des prières sont récitées à voix basse, dans un murmure des lèvres ; enfin un signe de croix vient clore le cérémonial.

 

Suivant le mal en cause, le nombre de prières diffère, mais elles doivent être administrées une fois par jour et ce pendant trois jours. Pour les entorses, trois prières sont indispensables, avec un signe de croix au début et à la fin de chacune d’elles. Simultanément Monette effectue des massages, du bas vers le haut comme le lui a appris son aïeule. Elle sent intuitivement sous ses doigts où se situe le point de tension : une petite boule dure.

 

Pour les zonas, deux prières sont utilisées et ce également pendant trois jours. Le zona est une infection plus délicate à traiter, sa guérison dépend de la gravité de son étendue. Une attente de trois jours pour évaluer s’il y a amélioration ou pas, avec la reprise des soins si ce n’est pas le cas, trois jours durant, jusqu’au rétablissement. Monette ressent une très grande fatigue quand elle s’occupe de zonas. Elle en a parfois six à s’occuper en même temps, ce qui l’empêche de dormir.

 

 

 

Monette soigne aussi à distance avec une photographie de la personne atteinte. Elle se concentre sur l’image et effectue ses prières en produisant des signes de croix directement sur le papier glacé. Afin d’optimiser la réussite du soin, elle opère toujours à la même heure et peut demander au malade de se masser là où il souffre à l’unisson.

 

 

 

Si le patient n’est pas croyant au bienfait des prières, la guérisseuse ne prodiguera que des massages, délaissant les prières qui de toute façon resteraient inefficaces. Il lui arrive de ne pas traiter une personne, car elle perçoit son incrédulité. Mais elle lui en parle, lui expliquant que son intervention restera inactive.

 

Cette capacité à soigner des gens n’est pas directement liée à la religion. Mais il faut avoir foi en cette puissance, foi en la guérison.

 

 

 

En remerciement, Monette ne demande rien, ses patients lui donnent ce qu’ils désirent, de l’argent ou un cadeau. La récompense se situe dans la disparition de la souffrance, pas dans ce qu’elle peut en retirer matériellement.

 

Elle peut se soigner elle-même, si elle peut atteindre l’endroit douloureux, ce qui exclut le dos par exemple. Lorsque ses propres prières demeurent inefficientes, elle n’hésite pas à aller voir un confrère.

 

 

 

Un jour, pendant la rééducation d’une de ses épaule cassée, un mauvais mouvement lui coinça le bras : elle ne pouvait plus le lever. Une radiographie confirma qu’un bout d’os gênait et qu’il devait par conséquent être retiré. Refusant l’opération, Monette se tourna vers un radiesthésiste guérisseur qui travaille à son compte. Après ce rendez-vous, elle put normalement bouger le bras. Qu’est-il advenu de ce petit os ? Seule une radio pourrait nous le dire. Tout va bien, Monette ne souhaite pas en savoir davantage. Mais lors de cet entretien, le radiesthésiste sentit autre chose : quelqu’un voulait du mal à Monette. En effet, peu de temps après, son entourage trouva son caractère changé : irascible,  acariâtre. Il ne la reconnaissait plus. Un mois plus tard elle contacta de nouveau son confrère qui lui conseilla vivement de revenir le voir. Elle assista alors à une séance de désenvoûtement. Depuis, elle a retrouvé le sourire et ne s’inquiète plus pour des broutilles. Elle est redevenue la Monette que tout le monde apprécie, bien plus détendue qu’auparavant.

 

 

 

Il arrive que certaines personnes malintentionnées la jalouse. Une de ses prétendues amies, racontant de-ci de-là être capable de faire autant de bien que de mal, l’avait ensorcelée afin de lui voler ses pouvoirs. Ce qu’avait décelé le radiesthésiste.

 

 

 

La guerre entre magie noire et magie blanche n’est pas que le lot des aventures de Fantasy. Dans la réalité aussi la bataille fait rage, même si cela peut prêter à rire…

 

 

 

Aucune maladie ne l’a encore empêchée de pratiquer ses dons. Enrhumée ou fiévreuse, Monette est toujours d’attaque pour venir en aide aux autres.

 

 

 

A 77 ans, elle pense passer la main à son tour, mais elle ne veut pas se précipiter, car une fois transmis, ils ne lui serviront plus.

 

Elle doit obligatoirement choisir une personne plus jeune qu’elle et possédant du fluide. Elle peut percevoir cette force en regardant simplement la personne. Il s’agit « d’un truc qu’on sent sur soi » comme elle l’explique. Des fourmillements qui envahissent le corps. Ceux qui ont du fluide peuvent en avoir plus ou moins.

 

Lorsqu’elle perpétuera ses dons, elle procèdera comme sa grand-mère le fit avec elle : son successeur devra ouvrir l’enveloppe au nom de la grand-mère de Monette, recopier de sa main les prières inscrites, glisser la feuille dans une enveloppe neuve au nom de Monette, et la conserver précieusement.

 

 

 

Certains parlent de vendre les dons, mais pour cette guérisseuse, il n’en est pas question : il s’agit de dons de Dieu offerts pour apporter du bien à son prochain et sûrement pas pour en recevoir des avantages lucratifs.

 
Pour l’heure, Monette espère assurément employer ses talents de nombreuses années encore et auprès d’un large public.


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N
Je me disais, aussi...Nanou
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K
Très intéressant ce texte qui parle d'un monde que je ne connais pas du tout. Intriguant, oui intriguant.Bien à toi
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N
Sam,ESt-ce une histoire vraie ou est-ce une fiction ? Car dans notre monde il ya encore des personnes comme Monette, que seuls les anciens connaissent. Ma grand-mère avait des dons. Elle soignait les brûlures avec ses mains. Elle pouvait même faire cuire un oeuf rien qu'en le mettant dans ses mains. Mais elle avait peur de ces dons. Elle s'en servait peu, sauf dans la famille. C'était une grand mère géniale, à qui il arrivait pleins de choses bizarres. C'est ainsi qu'il y a quelques années elle m'avoua avoir fait un voyage hors de son corps (elle ne l'a jamais dit à mon grand-père car elle en avait honte ! Mais à moi, elle savait qu'elle pouvait Tout raconter...  Merci de m'avoir fait penser un peu à elle.Nanou
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S
Dans cet article, tout ce que je raconte est on ne peut plus vrai. J'ai interviewé la copine de ma mère qui est guérisseuse et rapporté ses propos dans ce texte. J'ai été bercé par ces pratiques puisqu'originaire du Berry, tout en ne sachant pas grand chose car très tabou... Merci Nanou pour ton retour.